« Soleil de Printemps » par Pierre Bonnard et Alfred Jarry

bonnard-jarry-soleil-de-printemps
Pierre Bonnard et Alfred Jarry, « Soleil de Printemps », Le Canard sauvage, n°1, 21 mars 1903. Source : Gallica.bnf.fr

 

Ce « Soleil de Printemps » de saison fut publié pour la première fois il y a exactement 106 ans, dans le premier numéro de la revue Le Canard sauvage du 21 mars 1903 (1). Il est le fruit d’une collaboration entre deux amis : Pierre Bonnard (1867-1947) et Alfred Jarry (1873-1907). Le premier est illustrateur et peintre, connu pour appartenir au groupe des Nabis ; le second, poète et romancier, créateur du fameux père Ubu et de la ‘Pataphysique (2).

A y regarder de plus près, cette page ressemble davantage à un poème illustré qu’à une histoire en images telle que l’on pouvait en trouver dans la presse illustrée de l’époque. Les vers de Jarry, séparés par un tiret, se suivent à la ligne. Et les dessins à main levée de Bonnard s’intercalent en suivant, comme ils peuvent, le défilement de la prose. Mais il n’empêche, à chaque vignette répond son ou ses vers, et vice versa.

Flirtant encore avec la séquentialité en images, nous noterons une autre association entre ces deux amis, précédente à celle-ci. En 1901 paraît l’Almanach illustré du Père Ubu (XXe siècle) (3). L’illustrateur y prête sa plume pour donner forme au Père Ubu tout au long des différents textes qui composent cet ouvrage. Dans « Ubu colonial », une double page de dessins se démarque des vignettes, hors-texte et autres culs-de lampe que Bonnard a jusqu’alors dessinés dans l’Almanach.

 « Ubu colonial », L’Almanach illustré du Père Ubu, 1901, p. 42-43.

Ces deux planches de Bonnard correspondent au passage du texte dans lequel Père Ubu, de retour d’une « ruineuse exploration coloniale, aux frais du gouvernement français », raconte qu’en Afrique l’autruche « est assez abondante » : « Nous sommes assez stupéfaits de n’en avoir point capturé davantage, car nous avons observé exactement toutes les recettes qui sont préconisées au sujet de cette chasse dans nos livres de cuisine, et principalement celle qui consiste à se cacher la tête sous une pierre. » Ce à quoi son auditeur, Fourneau, répond : « Vous aurez lu, sans doute :  chasse aux truffes. »

La double page de Bonnard met en images la technique de chasse du Grand-Maître de la Gidouille. On comprend mieux le peu de succès du chasseur car, du volatil ou de l’homme, on ne sait lequel montre le plus d’intelligence, les deux se neutralisant au final…


Mise-à-jour du 9-04-2009 :
Cet article traduit en italien par Massimo Cardellini (« Sole di Primavera ») est consultable sur Letteratura&Grafica.

 

  1. Cette revue est consultable sur Gallica. []
  2. A noter que, cinquante-quatre ans après sa parution dans Le Canard sauvage, cette planche fut l’objet d’une publication interne du Collège de ‘Pataphysique, sous le n° XIII de la collection Haha, le 8 absolu de l’An 85 (vulg. 15 septembre 1957) : http://www.college-de-pataphysique.org/PI-1//pub-28.html. []
  3. Cet Almanach est téléchargeable sur le site www.alfredjarry2007.fr []
Leave a comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.