Adolf Oberländer, « Das Krokodil (Ein Carnevals-Abenteuer in acht Bildern) », Fliegende Blätter, vol. 90, n° 2271, 1889.
Source : Universitätsbibliothek Heidelberg – digi.ub.uni-heidelberg.de
« Das Krokodil » est sans doute l’une des plus intéressantes bandes dessinées qu’ait donnée Adolf Oberländer (1845-1923) au Fliegende Blätter. Cette histoire muette en huit tableaux fut publiée en 1889 dans le n° 2271 de la revue allemande.
L’imbrication des vignettes de la première page est plutôt originale. Dans la première image, toute en profondeur, un homme déguisé en crocodile descend les marches d’un escalier. Il se dirige vers la sortie d’un bal masqué, au bras de sa belle. Cette scène offre une vue en contre-plongée qui donne une stature imposante aux trois clowns blancs qui s’apprêtent à lui marcher sur la queue.
Les marches se prolongent dans leur partie basse et forment deux pans hachurés qui organisent les deux scènes suivantes : le premier sert de façade pour la salle de bal, avec sa porte de sortie devant laquelle se déroule une bagarre ; la seconde dresse en une perspective fuyante les façades d’une rue où le crocodile s’enfuit, poursuivi par des chiens qui en veulent à son appendice.
La seconde page, à la composition plus classique, est moins dense : elle démarre par une séquence au décor minimal (une porte et sa sonnette) où le héros continue d’accumuler les ennuis avec son déguisement. La grande image finale, tout aussi lumineuse que la première, ressemble au réveil difficile du mauvais rêve qui vient de se dérouler. On notera que ces deux planches sont chacune circonscrites sur une feuille dessinée en trompe-l’oeil dont un coin (en bas à droite pour la première et en haut à gauche pour la seconde) est légèrement corné de manière à indiquer l’enchaînement des deux pages.
Pour finir, on rapprochera la composition de la première page de celles que donnera un siècle plus tard le dessinateur américain Will Eisner (1917-2005), notamment la manière d’enchevêtrer les vignettes et de s’appuyer sur un élément du décor (ici, l’escalier) pour lier les images dans leur continuum. La ressemblance entre « Das Krokodil » avec la séquence suivante, extraite de l’album Invisible People publié pour la première fois aux Etats-Unis en 1993, est en ce sens assez étonnante…
Will Eisner, Extrait du Peuple invisible (Invisible People, 1993), in Big City, Glénat, 1999.
Copyright © Will Eisner Studios, Inc.
Nous proposerons prochainement d’autres histoires en images d’Adolf Oberländer.
Très intéressent vraiment!
Je vais le traduire tout de suite!
Bravo!
Ha, superbe trouvaille! Je vous remercie.